Dislocation
Certains lieux sont laissés à l’abandon: ils ne correspondent plus aux besoins de la société qui finit par les oublier. Plus personne ne semble s’y intéresser. Souvent la trace d’un riche passé industriel, ces friches se dressent au milieu ou en périphérie des villes, abandonnées à leur propre sort. Elles sont le témoin d’une époque révolue : celle où le destin des hommes et des femmes était lié au fonctionnement de l’usine. Puis, il y a eu la fermeture. Beaucoup de questions, peu de réponses. Un sentiment d’avoir tout perdu du jour au lendemain. De gâchis. Le matériel est revendu au plus offrant, le reste est laissé aux pillards. Pendant ce temps, inexorablement, jour après jour, la pluie, le vent, les éléments altèrent petit à petit les structures. Les vitres se brisent, les poutres métalliques plient, l’eau ruisselle sur les murs et la nature semble reprendre ses droits.
Au delà du chaos
Ce n’est pas cet état de déliquescence et de dislocation que je souhaite montrer au travers de mes photos. Au contraire, je cherche autant que possible à laisser entrevoir une certaine harmonie. A dépasser ce sentiment de chaos et d’abandon. Rechercher des éléments structurants afin de redonner de manière éphémère un sens et une cohésion à ces bâtiments. Cependant, de nombreux indices montrent que cet équilibre reste très précaire : la ressemblance se substitue à la symétrie parfaite ; les lignes fuyantes aux perspectives convergentes.
Dis. Location
Alors qu’il existe une règle tacite qui impose de ne pas dévoiler la localisation des sites abandonnés, chaque photo est accompagnée d’un titre faisant référence à un lieu. La localisation donnée est soit réelle soit imaginaire (en lien avec le cinéma, la mythologie ou encore avec l’univers des jeux vidéo). Le titre n’est donc pas une précision géographique concernant le lieu de prise de vue comme on pourrait s’y attendre mais est une invitation à regarder la photo avec d’autres clefs de lecture, à résoudre l’énigme proposée par l’association de la photo et de son titre. C’est à l’imaginaire de prendre le pas sur la réalité: la fonction initiale du lieu disparait au profil d’une autre, fantasmée. La fiction se mêle à la réalité pour créer de toute pièce un espace dystopique.